2)
La mise en place du plan thématique :
|
Le
plan thématique se reconnaît en ce qu'il n'invite pas à
une confrontation de thèses : un jugement, ou une simple
question, demandent à être étayés dans divers domaines qui
constituent autant de thèmes où la notion va trouver sa
justification.
sujet
10
Il vous est sans doute arrivé de préférer au
"héros" vertueux d'une œuvre littéraire ou
cinématographique le personnage odieux dont il
finit par triompher.
Quelles sont, selon vous, les raisons qui
expliquent l'attrait qu'exercent ces personnages
odieux ?
Les termes du sujet : on précisera
l'opposition entre "vertueux" (le héros qui
incarne les forces du Bien) et "odieux" (celui
que l'on hait pour son indignité morale, "le
méchant").
La position de la problématique
: « On ne fait pas de bonne
littérature avec de bons sentiments », disait
André Gide. Le fait est qu'une œuvre tire
souvent sa saveur d'une exploration du Mal, à
côté de laquelle la vertu paraît parfois fade
et convenue. A quoi attribuer cette
fascination du lecteur et du spectateur pour
les personnages auxquels leur enracinement
dans le Mal donne une couleur particulière ?
Les domaines d'application :
les fictions romanesques, théâtrales,
cinématographiques.
La recherche du plan :
le libellé invite ici à une sorte de catalogue
des raisons qui peuvent faire préférer ce
personnage, ce qui est caractéristique du plan
thématique.
I - LE PERSONNAGE
ODIEUX EST SOUVENT LE MOTEUR DE L'HISTOIRE :
- C'est contre lui
que nous combattons aux côtés du héros, et à
ce combat se mêle une secrète fascination
(Tartuffe, personnage éponyme de la pièce de
Molière).
- Le personnage
odieux incarne les forces brutales de
l'existence et rend l'œuvre plus humaine et
authentique (Vautrin dans Le Père Goriot de
Balzac).
- Son itinéraire
devient exemplaire et c'est lui qui est
porteur de la leçon morale.
II - LE
PERSONNAGE ODIEUX EST SOUVENT PLUS ORIGINAL ET
ÉLABORÉ :
- Il est moins
monolithique que le héros vertueux; son
cynisme cache souvent une vraie tendresse
(Valmont dans Les
Liaisons dangereuses de
Laclos).
- Le personnage
odieux peut révéler les faiblesses de ceux qui
se contentent de suivre les chemins tout
tracés : haut en couleurs ou pittoresque, il
traîne après lui le charme sulfureux de la
révolte (Mme de Merteuil dans Les
Liaisons dangereuses, Don
Juan dans la pièce de Molière).
Voir ce qu'écrit François Mauriac à propos de
son personnage de Thérèse Desqueyroux : «
Beaucoup s'étonnent que j'aie pu imaginer
une créature plus odieuse encore que tous
mes autres héros. Saurai-je jamais rien dire
des êtres ruisselants de vertu et qui ont le
cœur sur la main ? Les "cœurs sur la main"
n'ont pas d'histoire : mais je connais celle
des cœurs enfouis et tout mêlés à un corps
de boue.»
III - LE
PERSONNAGE ODIEUX EST SOUVENT RÉGÉNÉRÉ PAR SON
CHÂTIMENT :
- On peut tout à
coup découvrir en lui une victime et éprouver
de la pitié à son égard (Javert dans Les
Misérables).
- Il garantit donc
la vraisemblance d'une intrigue et permet que
se dégage de l'œuvre une morale vivante et
tolérante.
|
Le plan analytique se distingue du plan thématique
en ce qu'il propose un examen méthodique d'une notion : ce
peut être le type de plan « causes/conséquences/solutions
» ou une approche méthodique d'une notion qu'on commencera
par expliquer, puis qu'on justifiera avant d'analyser ses
implications.
sujet
2
«
Il n'y a pas de vrai sens d'un texte. Pas
d'autorité de l'auteur. Quoi qu'il ait voulu dire,
il a écrit ce qu'il a écrit. Une fois publié, un
texte est comme un appareil dont chacun peut se
servir à sa guise et selon ses moyens.»
Comment comprenez-vous cette opinion de
Paul Valéry ?
Les
termes du sujet : il invite à
examiner la notion de « sens », entendu à la
fois comme direction à faire prendre au texte et
interprétation de son contenu.
Le libellé du sujet :
il s'agit d'une question ouverte vers une
appréciation personnelle où vous aurez
l'occasion de vous défaire de cette croyance
naïve selon laquelle l'auteur voudrait toujours
"faire passer un message" (sic), mais
aussi de cette prudence intimidée devant le
texte que l'école, il faut bien le dire,
encourage sans toujours le vouloir.
La position de la problématique : les
théoriciens modernes ont combattu la notion de «
sens », en raison des lois internes de
l'écriture qui génère plusieurs niveaux de
signification inconnus de l'auteur lui-même. Ils
ont fait valoir ainsi les droits du lecteur,
fondé à déterminer librement le parcours
personnel qu'il choisit d'emprunter dans
l'œuvre.
Comment justifier alors cette position
selon laquelle l'auteur n'aurait pas d'autorité
particulière sur le sens de son texte, et le
lecteur tous les droits de l'interpréter, comme
il le veut et peut ?
Les domaines d'application :
la création littéraire, la critique littéraire,
le rôle du lecteur dans l'appréciation de
l'œuvre.
La recherche du plan :
cette question appelle un examen méthodique. Il
faudra d'abord expliquer les termes de Paul
Valéry, puis les justifier avant de déterminer
leurs conséquences sur l'acte d'écrire et de
lire.
I -
EXPLICATION :
- Cette
affirmation peut surprendre : l'auteur passe
pour celui qui s'efforce de transmettre un
message (voir les nombreuses préfaces, les
avis au lecteur, par exemple ceux de Laclos
dans Les
Liaisons dangereuses, des Confessions
de Rousseau).
- Traditionnellement,
la littérature a fait l'objet d'exégèses,
d'explications de textes où le commentateur,
le professeur prétendent se faire les
interprètes quasi officiels du texte.
Parallèlement, celui-ci apparaît au public
comme un monument vers lequel il désespère de
jamais pouvoir se hisser, découragé par ses
opacités, ses mystères.
- Si la question
rituelle du lecteur est encore le fameux
"qu'est-ce que l'auteur a voulu dire ?", c'est
aussi que certains courants littéraires l'y
ont habitué. On pense à toute la littérature à
thèse, aux écrivains "engagés" qui imposaient
clairement leur vision du monde : voir les
apologues du XVIII° siècle (Candide
de Voltaire), les écrits d'un Sartre (Qu'est-ce
que la littérature?).
II -
JUSTIFICATION :
- Or, depuis le
XIX° siècle, l'auteur a lui-même préparé son
lecteur à faire le chemin tout seul. Il a même
parfois renoncé au «sens» : la poésie
symboliste a voulu suggérer des
correspondances (Baudelaire). Le poème est
devenu un carrefour de significations
pareillement admissibles dès lors que la
raison, l'étroite utilité de la parole n'y
sont pas concernées. « J'ai voulu
dire ce que ça dit, littéralement et dans
tous les sens », explique Rimbaud, et
Nerval nous prévient : «[Mes poèmes]
perdraient de leur charme à être expliqués,
si la chose était possible.».
- Les découvertes
fondamentales de la psychanalyse sur
l'inconscient humain ont révélé l'insuffisance
de la raison et de la volonté dans toute
entreprise de connaissance de soi. Les
surréalistes se sont ainsi employés à dérouter
le sens par la stimulation ludique de
l'énergie de l'inconscient, cependant que, de
plus en plus, les romanciers ou les
dramaturges modernes mettaient en scène le
vide métaphysique, l'absurde ou les petits
riens qui meublent des vies inutiles (Ionesco,
Beckett).
- Enfin la
critique moderne donne le pas à la forme sur
le fond et considère le texte comme une unité
linguistique où le sens est toujours à
construire, jailli de l' « humus silencieux »
(Barthes) de l'écrivain, où le fourmillement
des métaphores personnelles participe d'un
mythe privé indépendant de l'intentionnalité.
III -
CONSÉQUENCES :
- Il semble qu'il
faille aujourd'hui souscrire à la phrase de
Valéry : loin d'un privilège exclusif réservé
à quelque génie, l'inspiration s'assimile en
effet pour nous à un passage particulier du
langage de tout le monde à travers une
sensibilité. Renonçant au sens et au message
dispensé de haut par quelque mage, la critique
littéraire a contribué à rapprocher le
créateur de son public et à débarrasser l'art
de la lourdeur des thèses et des idéologies («
La poésie doit être faite par tous et non
par un », dit Éluard).
- La littérature
n'est pas en effet une simple « mimèse » du
réel, ce qui exclut la tentation naïve de
vouloir à toute force l'y retrouver. Elle est
une recréation qui, à son tour, invite le
lecteur à trouver ses propres clés. Il peut
arriver d'ailleurs que l'auteur oriente le
lecteur vers un sens que ce dernier va
infirmer, retrouvant, comme au-delà de
l'intention avouée, la motivation inconsciente
de l'écrivain (voir par exemple les
différences de compréhension d'une œuvre selon
les époques, ainsi celle de Molière par les
Romantiques).
- Enfin, et de
manière plus générale, la phrase de Valéry a
le mérite de remettre en cause le rôle de la
raison et de l'intelligence critique dans la
compréhension d'une œuvre. Car trop souvent
celle-ci est réduite à quelque énigme
intellectuelle qu'on aurait la satisfaction
d'avoir déchiffrée, alors que la véritable
compréhension est affaire de plaisir et de
communion (« Les chemins de la
connaissance ne passent que par le cœur »,
écrit André Breton).
|
Le
plan comparatif permet de soutenir un parallèle entre deux
notions avant de proposer un dépassement de cette
confrontation. Ces notions (deux genres, deux
mouvements...) peuvent ne pas être systématiquement
opposées. Les deux premières parties s'y consacrent
d'abord successivement, les éclairent, en cherchent les
implications. La troisième partie peut tenter de les
concilier ou d'examiner la pertinence de leur opposition.
sujet
7
A
La
Rochefoucauld qui déclare : « Il est plus nécessaire
d'étudier les hommes que les livres », George Sand
semble répliquer lorsque, dans son roman Mauprat,
elle recommande comme moyen de formation « l'étude
des lettres, qui n'est autre que l'étude des
hommes.»
Quelles réflexions vous suggèrent ces prises
de position ?
Les
termes du sujet : on retiendra
surtout le mot "étude" qui implique une démarche
assidue de connaissance et non un simple savoir
acquis par la fréquentation.
Le libellé du sujet : il
est suffisamment ouvert pour laisser libre cours à
une appréciation personnelle.
La position de la problématique
: peut-on connaître les hommes par les livres ?
Les domaines d'application :
la littérature et plus particulièrement le roman,
l'éducation.
La recherche du plan :
l'examen préalable des deux conceptions et la
nécessité d'en tirer un commentaire personnel
recommandent le plan comparatif.
I -
ÉTUDIER LES HOMMES PLUS QUE LES LIVRES :
- La Rochefoucauld
prône en moraliste l'étude des caractères humains
par la fréquentation assidue des milieux sociaux,
l'observation psychologique, seules capables de
fortifier l'expérience.
- Il peut condamner
tout ce qui dans les livres peut compromettre
cette connaissance : l'idéalisme, la fiction, le
recul spéculatif.
- Une connaissance
purement livresque peut en effet éloigner le
lecteur de ses semblables et lui en inspirer une
vision artificielle.
II -
ÉTUDIER LES LIVRES POUR CONNAÎTRE LES HOMMES :
- Longtemps l'étude
des lettres a fait partie des "humanités", ces
disciplines scolaires où la fréquentation des
textes était considérée comme particulièrement
formatrice. La création littéraire enferme en
effet l'essentiel d'une expérience acquise parmi
les hommes.
- La littérature donne
forme à l'humain. Contrairement aux autres
créatures en effet, les hommes manifestent des
conduites diverses dont l'étude peut être complexe
voire impossible : les livres fournissent alors un
cadre précieux.
- La création
littéraire peut ne pas être étrangère à une étude
soigneuse des milieux et des caractères (cf. le
roman réaliste ou naturaliste).
III - VERS
UNE COMPLÉMENTARITÉ :
- L'étude des livres
prépare à la connaissance des hommes, comme
l'étude des hommes favorise la fréquentation
fertile des livres.
- Il arrive que des
personnages de romans nous soient plus familiers
que nos proches et que l'on traverse la vie
sociale muni de ces modèles compagnons.
- Enfin le livre reste
la mémoire d'une civilisation, et ce dans quoi
souvent elle a enfermé une sagesse et une
expérience que nous pouvons utilement consulter.
|
Vous trouverez sur le site plusieurs exemples de
dissertations :
|
Voir sur Amazon :
|
|
|