Objets
d'étude : La poésie du XIXème au XXIème
siècle.
Corpus :
Victor HUGO : Fonction du poète
Louis ARAGON : Front rouge
Paul ÉLUARD : Courage
André BRETON : Sur la route de San Romano.
Depuis
la seconde moitié du XXème siècle, il apparaît comme
nécessaire que l'écrivain soit présent au monde qui
l'entoure, témoin voire acteur de ses luttes. A vrai dire,
la littérature n'a pas attendu Sartre ni Camus pour parler
d'engagement : dès la plus haute Antiquité, si l'écrivain
n'a pas toujours été partie prenante dans la Cité, il a du
moins confié à ses écrits l'essentiel d'une action
réellement politique que les trois genres de la rhétorique
avaient pour rôle de mettre en valeur. Le siècle des Lumières
a consacré à son tour cette responsabilité du littérateur,
conscient d'avoir à parler pour ceux qui ne peuvent le
faire ou décidé à prendre par sa plume la place que les
institutions lui refusaient.
Pour le poète, qui nous occupe ici, la
situation est un peu particulière. Les Anciens le
considéraient, on le sait, comme une sorte de prêtre ou de
mage, saisi par une inspiration d'origine divine. Cette
conception, empruntée notamment à Platon, assigne à la
poésie un domaine religieux et donne au poète une mission
sacrée de révélation qui fait de lui, peut-être, un guide
suprême mais l'exclut néanmoins des affaires de la Cité.
Au XXème siècle, dégagé de ce qui subsistait
de messianisme dans la poésie romantique, le poète s'est
voulu cette fois présent au réel, engagé dans la vie
immédiate, c'est-à-dire dans des combats politiques -
notamment ceux de la Résistance - où l'on n'avait pas
l'habitude de le rencontrer. Le groupement qui suit tente
d'organiser une réflexion sur ce nouvel emploi revendiqué
par certains poètes et les polémiques qui l'ont
accompagnée.
La
poésie peut-elle comme la prose utiliser un
langage utilitaire capable de se prêter aux
débats politiques ? La clarté, la logique
qu'ils requièrent sont-elles compatibles
avec le parti-pris d'écart ou de détour
propre à l'écriture poétique ? Pour tenter
de répondre à ces questions, nous proposons
un corpus de quatre textes, chacun étant
accompagné d'un document complémentaire.
La
mission du poète.
Une
longue tradition dote en effet le poète d'un obscur
privilège qui fait de lui une créature élue et maudite
tout à la fois. En lui se loge la secrète flamme dont
parlera encore Hugo, signe de l'élection divine qui selon
Platon donne
au poète des capacités divinatoires revendiquées si
couramment par Ronsard
ou Boileau :
C’est en vain qu’au Parnasse un
téméraire auteur
Pense de l’art des vers atteindre
la hauteur.
S’il ne sent point du Ciel
l’influence secrète,
Si son astre en naissant ne l’a
formé poète. (Art poétique, I) C'est aussi pour cela que Platon disqualifie
le poète de l'arène politique : la fureur sacrée qui
commande sa parole reste étrangère en effet aux qualités
rationnelles exigées par le débat et l'action pratique. Le
poète, s'il a à guider les hommes, le fera comme un prêtre
inspiré, dont la faculté divinatoire trace pour les
sociétés les chemins du futur.
[Dans la fameuse lettre du Voyant, Rimbaud
réactive le mythe icarien du poète voleur de
feu, décidé à sacrifier à l'humanité sa raison
et sa santé pour repousser les limites de
l'inconnu.]
[…]
La première étude de l'homme qui veut être
poète est sa propre connaissance, entière ; il
cherche son âme, il l'inspecte, il la tente,
l'apprend. Dès qu'il la sait, il doit la cultiver,
cela semble simple : en tout cerveau s'accomplit
un développement naturel ; tant d'égoïstes se
proclament auteurs ; il en est bien d'autres qui
s'attribuent leur progrès intellectuel ! — Mais il
s'agit de faire l'âme monstrueuse : à l'instar des
comprachicos, quoi ! Imaginez un homme
s'implantant et se cultivant des verrues sur le
visage.
Je dis qu'il faut être voyant, se faire
voyant.
Le Poète se fait voyant par un long, immense
et raisonné dérèglement de tous les sens. Toutes
les formes d'amour, de souffrance, de folie ; il
cherche lui-même, il épuise en lui tous les
poisons, pour n'en garder que les quintessences.
Ineffable torture où il a besoin de toute la foi,
de toute la force surhumaine, où il devient entre
tous le grand malade, le grand criminel, le grand
maudit, — et le suprême Savant ! — Car il arrive à
l'inconnu ! Puisqu'il a cultivé son âme, déjà
riche, plus qu'aucun ! Il arrive à l'inconnu, et
quand, affolé, il finirait par perdre
l'intelligence de ses visions, il les a vues !
Qu'il crève dans son bondissement par les choses
inouïes et innombrables : viendront d'autres
horribles travailleurs ; ils commenceront par les
horizons où l'autre s'est affaissé !
[…]
Donc le poète est vraiment voleur de feu.
Il est chargé de l'humanité, des animaux
même ; il devra faire sentir, palper, écouter ses
inventions ; si ce qu'il rapporte de là-bas
a forme, il donne forme : si c'est informe, il
donne de l'informe. Trouver une langue ;
— Du reste, toute parole étant idée, le
temps d'un langage universel viendra ! il faut
être académicien, — plus mort qu'un fossile, —
pour parfaire un dictionnaire, de quelque langue
que ce soit. Des faibles se mettraient à penser
sur la première lettre de l'alphabet, qui
pourraient vite ruer dans la folie ! —
Cette langue sera de l'âme pour l'âme,
résumant tout, parfums, sons, couleurs, de la
pensée accrochant la pensée et tirant. Le poète
définirait la quantité d'inconnu s'éveillant en
son temps dans l'âme universelle : il donnerait
plus — que la formule de sa pensée, que la
notation de sa marche au Progrès !
Énormité devenant norme, absorbée par tous, il
serait vraiment un multiplicateur de progrès
!
Cet avenir sera matérialiste, vous le voyez
; — Toujours pleins du Nombre et de l'Harmonie,
ces poèmes seront faits pour rester. — Au fond, ce
serait encore un peu la Poésie grecque.
L'art éternel aurait ses fonctions ; comme
les poètes sont citoyens. La Poésie ne rythmera
plus l'action ; elle sera en avant.
Ces poètes seront ! Quand sera brisé
l'infini servage de la femme, quand elle vivra
pour elle et par elle, l'homme, — jusqu'ici
abominable, — lui ayant donné son renvoi, elle
sera poète, elle aussi ! La femme trouvera de
l'inconnu ! Ses mondes d'idées différeront-ils des
nôtres ? — Elle trouvera des choses étranges,
insondables, repoussantes, délicieuses ; nous les
prendrons, nous les comprendrons.
En attendant, demandons aux poètes
du nouveau, — idées et formes. […]
Arthur
RIMBAUD
Lettre à Paul Demeny
15 mai 1871
Victor HUGO
Fonction du poète (Les Rayons
et les Ombres, 1840)
[…]
Le poète
en des jours impies
Vient préparer des jours meilleurs.
Il est l’homme des utopies,
Les pieds ici, les yeux ailleurs.
C’est lui qui sur toutes les têtes,
En tout temps, pareil aux prophètes,
Dans sa main, où tout peut tenir,
Doit, qu’on l’insulte ou qu’on le loue,
Comme une torche qu’il secoue,
Faire flamboyer l’avenir !
Il voit,
quand les peuples végètent !
Ses rêves, toujours pleins d’amour,
Sont faits des ombres que lui jettent
Les choses qui seront un jour.
On le raille. Qu’importe ! il pense.
Plus d’une âme inscrit en silence
Ce que la foule n’entend pas.
Il plaint ses contempteurs frivoles ;
Et maint faux sage à ses paroles
Rit tout haut et songe tout bas ! […]
Peuples !
écoutez le poète !
Écoutez le rêveur sacré !
Dans votre nuit, sans lui complète,
Lui seul a le front éclairé.
Des temps futurs perçant les ombres,
Lui seul distingue en leurs flancs sombres
Le germe qui n’est pas éclos.
Homme, il est doux comme une femme.
Dieu parle à voix basse à son âme
Comme aux forêts et comme aux flots.
C’est lui
qui, malgré les épines,
L’envie et la dérision,
Marche, courbé dans vos ruines,
Ramassant la tradition.
De la tradition féconde
Sort tout ce qui couvre le monde,
Tout ce que le ciel peut bénir.
Toute idée, humaine ou divine,
Qui prend le passé pour racine
A pour feuillage l’avenir.
Il
rayonne ! il jette sa flamme
Sur l’éternelle vérité !
Il la fait resplendir pour l’âme
D’une merveilleuse clarté.
Il inonde de sa lumière
Ville et désert, Louvre et chaumière,
Et les plaines et les hauteurs ;
À tous d’en haut il la dévoile ;
Car la poésie est l’étoile
Qui mène à Dieu rois et pasteurs !
23 mars -1er avril
1839.
une
fonction politique ? : Si l'on
s'attache au sens littéral du mot politique
(nom ou adjectif relatifs aux affaires de
l'État et à leur conduite), montrez comment
le texte de Hugo sort de son champ. Vous
pourrez pour cela relever tout ce qui manifeste le
caractère religieux donné à la figure du poète.
Montrez aussi comment Hugo privilégie ici les
figures de l'opposition (antithèses, oxymores).
Pourquoi ?
mythe et utopie : En quoi le
texte de Rimbaud (texte de gauche) rejoint-il
celui de Hugo pour faire du poète un nouveau
Messie ? « La Poésie ne rythmera plus
l'action, elle sera en avant », affirme
Rimbaud. Quelles différences constatez-vous dans
cette promesse par rapport à ce qu'on nomme un
projet politique ? Dans Une Saison
en enfer, Rimbaud préfigurera une sorte
d'adieu en écrivant : « Moi ! moi qui me suis
dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je
suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et
la réalité rugueuse à étreindre ! ». À quoi
selon vous peut-on attribuer cet échec ?
Une conception étroite de l'action
politique a certes toujours fait ricaner des
pouvoirs de la poésie : Rimbaud a eu par exemple à
subir l'ironie d'un directeur de journal qui
répondait ainsi à son offre de publication en
pleine invasion prussienne (9 novembre 1870) :
Impossible
d'insérer vos vers en ce moment. Ce qu'il nous
faut, ce sont des articles d'actualité et
ayant une utilité immédiate. Quand l'ennemi ne
sera plus sur notre sol, nous aurons peut-être
le temps de prendre les pippeaux (sic)
et de chanter les arts de la paix. Mais
aujourd'hui, nous avons autre chose à faire.
Que
répondriez-vous à ce directeur de journal sur son
sens de l'utilité immédiate ?
Misère
de la poésie.
Ce
n'est pas un des moindres paradoxes du Surréalisme
que d'avoir entretenu au début du XXème siècle l'espérance
d'un salut du monde par la poésie et de l'avoir en même
temps évacuée des préoccupations étroitement politiques.
Cette contradiction est à vrai dire plus le fait d'André
Breton que celui du mouvement tout entier, Breton qui, sur
la question de l'Art pour l'Art, reste dans la lignée de Baudelaire,
du Parnasse
et du Symbolisme
:
Une
foule de gens se figurent que le but de la
poésie est un enseignement quelconque, qu'elle
doit tantôt fortifier la conscience, tantôt
perfectionner les mœurs, tantôt enfin démontrer
quoi que ce soit d'utile... La Poésie, pour peu
qu'on veuille descendre en soi-même, interroger
son âme, rappeler ses souvenirs d'enthousiasme,
n'a pas d'autre but qu'Elle-même; elle ne peut
pas en avoir d'autre, et aucun poème ne sera si
grand, si noble, si véritablement digne du nom
de poème, que celui qui aura été écrit
uniquement pour le plaisir d'écrire un poème.
(Baudelaire, L'Art romantique, 1857).
Ainsi
lorsque Louis Aragon publie en 1931 le poème
insurrectionnel « Front Rouge » et qu'il
se voit inculpé pour excitation des militaires à la
désobéissance et provocation au meurtre dans un but de
propagande anarchiste, Breton intervient aussitôt
et plaide : « On ne s’avisait pas que la phrase
poétique pût être jugée sur son contenu immédiat et au
besoin incriminée judiciairement au même titre que toute
autre forme mesurée d’expression ». Fort de la
distinction établie par Hegel entre la poésie et la prose,
Breton ne craint pas d'affirmer qu'un poète n’est pas plus
responsable du sens de son œuvre que l’homme l'est de ses
rêves. Cette apologie de l'irresponsabilité du poète ne
pouvait que se heurter à la conception marxiste de
l’écrivain comme acteur du processus historique, et
l'affaire de « Front Rouge » provoqua la rupture des
surréalistes avec le Parti communiste, et celle de Breton
et Aragon.
Nous
avons dit que le "poème" était tel qu'en matière
d'interprétation la considération de son sens
littéral ne parvenait aucunement à l'épuiser, nous
avons soutenu qu'il était abusif de prétendre
l'identifier devant la loi à toute espèce de texte
répondant au désir d'expression exacte, autrement
dit mesurée et pesée de la pensée. Dans le Manifeste
du Surréalisme, j'ai tenu, au nom de la
conception poétique que mes amis et moi nous avions,
à dégager entièrement la responsabilité de l'auteur
pour le cas où seraient incriminés certains textes
de caractère "automatique" incontestable. […]
C'est jouer à mon sens sur les mots que
d'avancer que le poème « dépasse » en signification
et en portée son contenu immédiat. Il échappe, de
par sa nature, à la réalité même de ce contenu. Le
poème n'est pas à juger sur les représentations
successives qu'il entraîne mais bien sur le pouvoir
d'incarnation d'une idée, à quoi ces
représentations, libérées de tout besoin
d'enchaînement rationnel, ne servent que de point
d'appui. La portée et la signification du poème sont
autre chose que la somme de tout ce que l'analyse
des éléments définis qu'il met en œuvre permettrait
d'y découvrir et ces éléments définis ne sauraient à
eux seuls, pour une si faible part que ce soit, le
déterminer en valeur ou en devenir. S'il n'en était
pas ainsi, il y a longtemps que le langage poétique
se fût aboli dans le prosaïque et sa survivance
jusqu'à nous, nous est le meilleur garant de sa
nécessité. « Si, déclare Hegel, la
prose a pénétré avec son mode particulier de
conception dans tous les objets de l'intelligence
humaine, et a déposé partout son empreinte, la
poésie doit entreprendre de refondre tous ces
éléments et de leur imprimer son cachet original.
Et, comme elle a aussi à vaincre les dédains de
l'esprit prosaïque, elle se trouve de toutes parts
enveloppée dans de nombreuses difficultés. Il faut
qu'elle s'arrache aux habitudes de la pensée
commune qui se complaît dans l'indifférent et
l'accidentel », que, sous tous les rapports,
elle transforme « le mode d'expression de la
pensée prosaïque en une expression poétique et,
malgré toute la réflexion qu'exige nécessairement
une pareille lutte, qu'elle conserve l'apparence
parfaite de l'inspiration et la liberté originale
dont l'art a besoin
».
Je pense qu'une telle opinion, qui n'a rien
de spécifiquement idéaliste, n'a aucun besoin d'être
révisée. Il est juste de tenir la poésie et la prose
pour deux sphères nettement distinctes de la pensée,
juste d'affirmer que les représailles dont on
s'apprête à user contre la poésie constituent, de la
part des pouvoirs bourgeois, une intrusion plus
intolérable encore que les autres (il s'agit de
juger rationnellement de choses par définition
irrationnelles), une atteinte incomparablement plus
arbitraire et plus profonde à la liberté de penser
(dans un domaine où la façon de penser est
inséparable de la façon de sentir). Refuser de le
reconnaître, ce n'est pas faire acte de pureté
morale ou de dureté révolutionnaire, c'est seulement
manifester à la poésie les dédains de l'esprit
prosaïque dont parle Hegel, c'est seulement se
ranger parmi les contempteurs de la poésie ou, plus
généralement, parmi les philistins.
[...]
Plus loin plus loin vers l’ouest où dorment les
enfants riches et les putains de première classe
Dépasse la Madeleine Prolétariat
Que ta fureur balaye l’Élysée
Tu as bien droit au Bois de Boulogne en semaine
Un jour tu feras sauter l’Arc de triomphe
Prolétariat connais ta force
connais ta force et déchaîne-la
II prépare son jour il attend son heure sa minute
la seconde
où le coup porté sera mortel et la balle à ce
point sûre
que tous les médecins socialfascistes
Penchés sur le corps de la victime
Auront beau promener leur doigts chercheurs sous
la chemise de dentelle
ausculter avec les appareils de précision son cœur
déjà pourrissant
ils ne trouveront pas le remède habituel
et tomberont aux mains des émeutiers qui les
colleront au mur
Feu sur Léon Blum
Feu sur Boncour Frossard Déat
Feu sur les ours savants de la social-démocratie
Feu feu j’entends passer
la mort qui se jette sur Garchery
Feu vous dis-je
Sous la conduite du parti communiste
SFIC
Vous attendez le feu sous la gâchette
Que ce ne soit plus moi qui vous crie
Feu
Mais Lénine
Le Lénine du juste moment [...]
J’assiste à l’écrasement d’un monde hors d’usage
J’assiste avec enivrement au pilonnage des
bourgeois
[...] Je chante la domination violente du
Prolétariat sur la bourgeoisie
pour l’anéantissement de cette bourgeoisie
pour l’anéantissement total de cette bourgeoisie
À vous Jeunesses communistes
[...] Dressez-vous contre vos mères
Abandonnez la nuit la peste et la famille
Vous tenez dans vos mains un enfant rieur
un enfant comme on n'en a jamais vu
Il sait avant de parler toutes les chansons de la
nouvelle vie
Il va vous échapper Il court Il rit déjà
Les astres descendent familièrement sur la terre
C'est bien le moins qu'ils brûlent en se posant
la charogne noire des égoïstes
[...] Les yeux bleus de la Révolution
brillent d'une cruauté nécessaire
SSSR
SSSR SSSR SSSR
[...] Voici la catastrophe apprivoisée
voici docile enfin la bondissante panthère
l'Histoire menée en laisse par la Troisième
Internationale
Le train rouge s'ébranle et rien ne l'arrêtera
[...] Le train s'emballe vers demain
SSSR toujours plus vite SSSR
[...] C'est le chant de l'homme et son rire
C'est le train de l'étoile rouge
qui brûle les gares les signaux les airs
SSSR Octobre
octobre c'est l'express
Octobre à travers l'univers SS
SR SSSR SSSR SSSR SSSR [...]
irresponsabilité
de la poésie ? : Breton valide ici
(document de gauche) une conception de la poésie que
l'on trouve déjà dans l'Antiquité et notamment chez
Platon, pour lequel le délire sacré qui anime le
poète le prive de la dialectique nécessaire aux
débats politiques. Ainsi le poème « échappe à la
réalité même de son contenu ». Dans une intention
similaire, Sartre écrit aussi : L'empire des signes, c'est la prose; la
poésie est du côté de la peinture, de la
sculpture, de la musique. [...] En fait, le poète
s'est retiré d'un seul coup du langage-instrument;
il a choisi une fois pour toutes l'attitude
poétique qui considère les mots comme des choses
et non comme des signes. […] S'il en est
ainsi, on comprendra facilement la sottise qu'il y
aurait à réclamer un engagement poétique. Sans
doute l'émotion, la passion même - et pourquoi pas
la colère, l'indignation sociale, la haine
politique - sont à l'origine du poème. Mais elles
ne s'y expriment pas, comme dans un pamphlet ou
dans une confession. A mesure que le prosateur
expose des sentiments, il les éclaircit; pour le
poète, au contraire, s'il coule ses passions dans
son poème, il cesse de les reconnaître : les mots
les prennent, s'en pénètrent et les métamorphosent
: ils ne les signifient pas, même à ses yeux (J.P.
Sartre, Qu'est-ce que la littérature?,
1945).
Ainsi le poète ne serait pas responsable de
ce qu'il écrit, et c'est dans ce sens que les
surréalistes lancèrent une pétition pour soutenir
Aragon. Cependant certains écrivains refusèrent de
la signer, notamment Romain Rolland et André Gide
qui revendiquèrent pour les paroles ou les écrits la
même responsabilité que pour les actes. Aragon
lui-même, au soir de sa vie, leur donna raison : L'honneur
de l'écrivain nécessite toujours qu'il se tienne
derrière les mots qu'il a écrits et se refuse à en
réduire la portée en les présentant comme de
simples métaphores (Une préface morcelée).
poème ou tract ? : « Front rouge »
s'inscrit très clairement dans le contexte politique
des années 30 et ne saurait donc se ranger parmi les
productions de l'écriture automatique. Qu'est-ce
qui, à votre avis, empêche de le considérer à
la fois comme un poème et comme un
texte politique ? Repérez notamment les formes du
tract et leur alternance avec les images proprement
poétiques. Breton affirme : « Je dis que ce
poème, de par sa situation, dans l’œuvre d’Aragon,
d’une part, et dans l’histoire de la poésie,
d’autre part, répond à un certain nombre de
déterminations formelles qui s’opposent à ce qu’on
en isole tel groupe de mots [...] pour exploiter
son sens littéral alors que pour tel autre groupe
[...] la question de ce sens littéral ne se pose
pas.» Quels
passages pourraient être pris à votre avis dans leur
sens littéral, comme dans un tract ? Lesquels au
contraire ne le pourraient pas ? Qu'en conclure de
la valeur révolutionnaire autant que poétique d'un
tel texte ?
Poètes
en résistance.
«
Depuis plus de cent ans, les poètes sont descendus
des sommets sur lesquels ils se croyaient. Ils sont
allés dans les rues, ils ont insulté leurs maîtres,
ils n'ont plus de dieux, ils osent embrasser la
beauté et l'amour sur la bouche, ils ont appris les
chants de révolte de la foule malheureuse et sans se
rebuter, essaient de lui apprendre les leurs. Peu
leur importent les sarcasmes et les rires, ils y
sont habitués, mais ils ont maintenant l'assurance
de parler pour tous. Ils ont leur conscience pour
eux. » Paul Éluard, L'Évidence poétique, 1937.
En
1940, la guerre rappela en effet les écrivains à cette
responsabilité, d'autant que les fascismes européens leur
faisaient une chasse toute particulière. Les surréalistes
se divisèrent alors de manière significative : certains
(Breton, Péret) choisirent l'exil, d'autres, sans fédérer
toujours une activité résistante, voulurent participer par
la poésie à la lutte contre l'occupant. Aragon, Desnos,
Éluard, notamment, se retrouvèrent ainsi au sommaire d'une
brochure baptisée L'Honneur des poètes (1943).
Ces poèmes eurent des fortunes variées, mais certains
jouèrent en effet un rôle dans les combats. On sait par
exemple que le poème d'Éluard "Liberté" fut parachuté
au-dessus des maquis.
Whitman animé par son peuple, Hugo appelant
aux armes, Rimbaud aspiré par la Commune,
Maïakovski exalté, exaltant, c’est vers l’action
que les poètes à la vue immense sont, un jour ou
l’autre, entraînés. Leur pouvoir sur les mots
étant absolu, leur poésie ne saurait jamais être
diminuée par le contact plus ou moins rude du
monde extérieur. La lutte ne peut que leur rendre
des forces. Il est temps de redire, de proclamer
que les poètes sont des hommes comme les autres,
puisque les meilleurs d’entre eux ne cessent de
soutenir que tous les hommes sont ou peuvent être
à l’échelle du poète.
Devant le péril aujourd’hui couru par
l’homme, des poètes nous sont venus de tous les
points de l’horizon français. Une fois de plus la
poésie mise au défi se regroupe, retrouve un sens
précis à sa violence latente, crie, accuse,
espère. Paul ÉLUARD
Préface de L'Honneur des poètes, 1943.
Paul ÉLUARD
Courage
(Au rendez-vous allemand,
1942).
Paris a
froid Paris a faim
Paris ne mange plus de marrons dans la rue
Paris a mis de vieux vêtements de vieille
Paris dort tout debout sans air dans le métro
Plus de malheur encore est imposé aux pauvres
Et la sagesse et la folie
De Paris malheureux
C'est l'air pur c'est le feu
C'est la beauté c'est la bonté
De ses travailleurs affamés
Ne crie pas au secours Paris
Tu es vivant d'une vie sans égale
Et derrière la nudité
De ta pâleur de ta maigreur
Tout ce qui est humain se révèle en tes yeux
Paris ma belle ville
Fine comme une aiguille forte comme un épée
Ingénue et savante
Tu ne supportes pas l'injustice
Pour toi c'est le seul désordre
Tu vas te libérer Paris
Paris tremblant comme une étoile
Notre espoir survivant
Tu vas te libérer de la fatigue et de la boue
Frères ayons du courage
Nous qui ne sommes pas casqués
Ni bottés ni gantés ni bien élevés
Un rayon s'allume en nos veines
Notre lumière nous revient
Les meilleurs d'entre nous sont morts pour
nous
Et voici que leur sang retrouve notre cœur
Et c'est de nouveau le matin un matin de Paris
La pointe de la délivrance
L'espace du printemps naissant
La force idiote a le dessous
Ces esclaves nos ennemis
S'ils ont compris
S'ils sont capables de comprendre
Vont se lever.
Le poème dit par
Éluard :
Courage
: Procédez à la lecture analytique de
ce poème en appliquant la méthode
indiquée. Vous pourrez plus particulièrement
remarquer comment le langage renonce ici à tous
les déplacements poétiques et vous
demander ce qui différencie ce poème d'un simple
tract.
débat :
Parlant des poètes, Éluard écrit
(document de gauche) : « Leur pouvoir sur les
mots étant absolu, leur poésie ne saurait jamais
être diminuée par le contact plus ou moins rude
du monde extérieur. » Comment
comprenez-vous cette affirmation ? N'est-ce pas
aussi avouer que la réalité extérieure reste pour
le poète une affaire de mots ? Comparez la
position d'Eluard avec celle du poète René Char :
le choix du silence :
« Honte à qui peut chanter pendant que Rome
brûle », clamait Lamartine. Quel doit être
le parti du poète quand l'actualité voudrait
plutôt que l'on prenne les armes ?
René Char a déjà pris quelque distance
à l'égard du Surréalisme lorsque la guerre est
déclarée. Est-ce pour se défier des mots qu'il
choisit alors de se taire pendant toute la durée
de l'Occupation et refuse de publier ?
«
Sans vouloir faire preuve d’agressivité
supérieure, il me semble que la seule
préoccupation sérieuse d’un poète en ce moment
doit être celle du silence (et non du
désœuvrement). A notre époque d’écrasement et de
dénaturation de la condition humaine, seule la
compagnie du feu et celle des otages me
paraissent harmonieuses. » (Lettre à René
Bertelé, 7 juin 1942).
Le recueil Fureur et mystère, qui
paraîtra en 1945, précise ce choix :
Le
poète est retourné pour de longues années dans
le néant du père. Ne l'appelez pas, vous tous
qui l'aimez. S'il vous semble que l'aile de
l'hirondelle n'a plus de miroir sur terre,
oubliez ce bonheur. Celui qui panifiait la
souffrance n'est pas visible dans sa léthargie
rougeoyante.
Ah ! beauté et vérité fassent que vous
soyez présents nombreux aux salves de la
délivrance.
En
attendant ces salves, auxquelles René Char
participe activement puisque, sous le nom de
capitaine Alexandre, il anime à Céreste un
réseau de résistance, les Feuillets d'Hypnos
gardent à couvert le feu poétique pour céder la
place à l'action : Hypnos saisit
l’hiver et le vêtit de granit.
L’hiver se fit sommeil
et Hypnos devint feu.
La suite appartient aux
hommes.
L'acte
de poésie.
De
quelle action politique peut donc se prévaloir la poésie ?
Si son véritable terrain est l'inactuel (Breton tenait
"Front Rouge" pour un texte poétiquement régressif
parce qu'il était un poème de circonstance), il faut sans
doute admettre que la liberté qu'on peut en attendre
dépasse de tous côtés la situation faite aux hommes dans
tel contexte politique. Après la guerre, Breton devait
rappeler les mots d'ordre qui avaient déjà présidé à la
fondation du Surréalisme : «"Transformer le monde" a
dit Marx ; "changer la vie" a dit Rimbaud : ces deux
mots d'ordre pour nous n'en font qu'un ». Si la
transformation du monde ne suffit pas, c'est qu'elle peut
ne pas remettre en cause les déterminations qui
continuent, quels que soient les régimes, à juguler les
hommes, notamment ces vieilles antinomies psychiques et
morales que le Surréalisme a entrepris de dépasser. À la
Libération, dans un moment délicat pour eux (les deux
poètes s'étaient exilés dès 1940 en Amérique), Benjamin
Péret et André Breton osèrent douter que les poèmes
publiés sous l'Occupation aient fait l'honneur de la
poésie.
[Réfugié au Mexique, le poète surréaliste
Benjamin Péret réagit à la publication de la
brochure L'Honneur des poètes. À ses
yeux, la poésie de circonstance ne peut que se
dénaturer, surtout quand elle prend des accents
nationalistes.] Voir
ici le texte intégral.
Le poète doit d’abord prendre conscience de
sa nature et de sa place dans le monde. Inventeur
pour qui la découverte n’est que le moyen
d’atteindre une nouvelle découverte, il doit
combattre sans relâche les dieux paralysants
acharnés à maintenir l’homme dans sa servitude à
l’égard des puissances sociales et de la divinité
qui se complètent mutuellement. Il sera donc
révolutionnaire, mais non de ceux qui s’opposent
au tyran d’aujourd’hui, néfaste à leurs yeux parce
qu’il dessert leurs intérêts, pour vanter
l’excellence de l’oppresseur de demain dont ils se
sont déjà constitués les serviteurs. Non, le poète
lutte contre toute oppression : celle de l’homme
par l’homme d’abord et l’oppression de sa pensée
par les dogmes religieux, philosophiques ou
sociaux. Il combat pour que l’homme atteigne une
connaissance à jamais perfectible de lui-même et
de l’univers. Il ne s’ensuit pas qu’il désire
mettre la poésie au service d’une action
politique, même révolutionnaire. Mais sa qualité
de poète en fait un révolutionnaire qui doit
combattre sur tous les terrains : celui de la
poésie par les moyens propres à celle-ci et sur le
terrain de l’action sociale sans jamais confondre
les deux champs d’action sous peine de rétablir la
confusion qu’il s’agit de dissiper et, par suite,
de cesser d’être poète, c’est-à-dire
révolutionnaire. [...]
Je ne veux pour exemple de ce qui précède qu’une
petite brochure parue récemment à Rio de Janeiro :
L’Honneur des poètes, qui comporte un
choix de poèmes publiés clandestinement à Paris
pendant l’occupation nazie. Pas un de ces « poèmes
» ne dépasse le niveau lyrique de la publicité
pharmaceutique et ce n’est pas un hasard si leurs
auteurs ont cru devoir, en leur immense majorité,
revenir à la rime et à l’alexandrin classiques. La
forme et le contenu gardent nécessairement entre
eux un rapport des plus étroits et, dans ces «
vers », réagissent l’un sur l’autre dans une
course éperdue à la pire réaction. Il est en effet
significatif que la plupart de ces textes
associent étroitement le christianisme et le
nationalisme comme s’ils voulaient démontrer que
dogme religieux et dogme nationaliste ont une
commune origine et une fonction sociale identique.
Le titre même de la brochure, L’Honneur des
poètes, considéré en regard de son contenu,
prend un sens étranger à toute poésie. En
définitive, l’honneur de ces « poètes » consiste à
cesser d’être des poètes pour devenir des agents
de publicité. [...]
En réalité, tous les auteurs de cette brochure
partent sans l’avouer ni se l’avouer d’une erreur
de Guillaume Apollinaire et l’aggravent encore.
Apollinaire avait voulu considérer la guerre comme
un sujet poétique. Mais si la guerre, en tant que
combat et dégagée de tout esprit nationaliste,
peut à la rigueur demeurer un sujet poétique, il
n’en est pas de même d’un mot d’ordre
nationaliste, la nation en question fût-elle,
comme la France, sauvagement opprimée par les
nazis. L’expulsion de l’oppresseur et la
propagande en ce sens sont du ressort de l’action
politique, sociale ou militaire, selon qu’on
envisage cette expulsion d’une manière ou d’une
autre. En tout cas, la poésie n’a pas à intervenir
dans le débat autrement que par son action propre,
par sa signification culturelle même, quitte aux
poètes à participer en tant que révolutionnaires à
la déroute de l’adversaire nazi par des méthodes
révolutionnaires, sans jamais oublier que cette
oppression correspondait au voeu, avoué ou non, de
tous les ennemis – nationaux d’abord, étrangers
ensuite – de la poésie comprise comme libération
totale de l’esprit humain car, pour paraphraser
Marx, la poésie n’a pas de patrie puisqu’elle est
de tous les temps et de tous les lieux. [...] Tout
« poème » qui exalte une « liberté »
volontairement indéfinie, quand elle n’est pas
décorée d’attributs religieux ou nationalistes,
cesse d’abord d’être un poème et, par suite,
constitue un obstacle à la libération totale de
l’homme, car il le trompe en lui montrant une «
liberté » qui dissimule de nouvelles chaînes. Par
contre, de tout poème authentique s’échappe un
souffle de liberté entière et agissante, même si
cette liberté n’est pas évoquée sous son aspect
politique ou social, et, par là, contribue à la
libération effective de l’homme.
Benjamin
PÉRET, Le déshonneur des poètes (1945)
La poésie
se fait dans un lit comme l’amour
Ses draps défaits sont l’aurore des choses
La poésie se fait dans les bois
Elle a
l’espace qu’il lui faut
Pas celui-ci mais l’autre que conditionnent
L’œil du
milan
La rosée sur une prèle
Le souvenir d’une bouteille de Traminer embuée
sur un plateau d’argent
Une haute verge de tourmaline sur la mer
Et la route de l’aventure mentale
Qui monte à pic
Une halte elle s’embroussaille aussitôt
Cela ne se crie pas sur les toits
Il est inconvenant de laisser la porte ouverte
Ou d’appeler des témoins
Les bancs
de poissons les haies de mésanges
Les rails à l’entrée d’une grande gare
Les reflets des deux rives
Les sillons dans le pain
Les bulles du ruisseau
Les jours du calendrier
Le millepertuis
L’acte d’amour et l’acte de poésie
Sont incompatibles
Avec la lecture du journal à haute voix
Le sens
du rayon de soleil
La lueur bleue qui relie les coups de hache du
bûcheron
Le fil du cerf-volant en forme de cœur ou de
nasse
Le battement en mesure de la queue des castors
La diligence de l’éclair
Le jet de dragées du haut des vieilles marches
L’avalanche
La chambre
aux prestiges
Non messieurs ce n’est pas la huitième Chambre
Ni les vapeurs de la chambrée un dimanche soir
Les
figures de danse exécutées en transparence
au-dessus des mares
La délimitation contre un mur d’un corps de
femme au lancer de poignards
Les volutes claires de la fumée
Les boucles de tes cheveux
La courbe de l’éponge des Philippines
Les lacés du serpent corail
L’entrée du lierre dans les ruines Elle a tout le temps devant elle
L’étreinte
poétique comme l’étreinte de chair
Tant qu’elle dure
Défend toute échappée sur la misère du monde
Poèmes, 1948.
Le texte dit par André Breton.
Sur la
route de San Romano : La
Bataille de San Romano est un tryptique de
Paolo
Uccello. Cette référence peut surprendre,
coiffant un poème si résolu à ignorer les
batailles des hommes, mais, dès les premières
pages de son ouvrage sur Le Surréallsme et la
peinture (1928), Breton mentionne déjà
cette œuvre dont il évoque "le cliquetis de lances
blondes sous un ciel noir". Ce cliquetis
correspond-il dans le poème à ses quatre strophes
centrales, véritables lances de métaphores,
intercalées dans la continuité d'un manifeste
poétique morcelé en tercets successifs ? Dans
celui-ci, volontairement prosaïque, la fermeté du
ton, comme si souvent chez Breton, accompagne le
jaillissement onirique des métaphores.
Il est douteux que ce poème résulte d'une
écriture automatique, mais l'explication littérale
de ces strophes est évidemment exclue. On peut
peut-être en trouver la source d'inspiration dans
les mots d'Isidore Ducasse (Lautréamont) : «
L’amour d’une femme est incompatible avec l’amour
de l’humanité » (Poésies). Tentez
néanmoins de rechercher les fils directeurs qui
ont structuré ces strophes. Considérez notamment
les deux phrases en italique.
un manifeste poétique : En
effet, dans le poème de Breton, deux affirmations
en italique attirent notre attention, semblant
ponctuer le discours rationnel qui rythme et
sépare les métaphores : Elle a l’espace qu’il
lui faut, Elle a tout le temps devant
elle. Ces formules renvoient à la
conception hégelienne selon laquelle la poésie est
enclose dans le champ de l'imagination et joue
librement de l'espace et du temps. En quoi le
texte de Benjamin Péret (document de gauche)
s'accorde-t-il au poème de Breton lorsqu'il
affirme que « la poésie n’a pas à intervenir
dans le débat autrement que par son action
propre »?
On aura peut-être une idée plus claire de
cette action en pensant à la manière dont Breton a
salué les
poètes de la négritude et particulièrement
Aimé Césaire :
ce qu'il retient dans la poésie de Césaire, ce ne
sont nullement les sujets politiques, mais la
parole, « belle comme l'oxygène naissant », et
elle seule, par sa capacité à réveiller la
léthargie de la langue.
Prenez à votre tour position dans le débat
sous la forme d'un dialogue...
L'usage
de la poésie et de la chanson dans les débats
de société a pu être contesté. Vous en
discutez avec un camarade. L'un d'entre vous
trouvera cet usage légitime, l'autre non.
Rédigez ce dialogue.
ou d'une dissertation :
Les
auteurs de L’Honneur des poètes ont
choisi, dans leur préface, de présenter ainsi
leur ouvrage : « C’est vers l’action que les
poètes à la vue immense sont, un jour ou
l’autre, entraînés ». Partagez-vous cette
conception de la poésie ? Vous organiserez
votre réponse en vous appuyant nécessairement
sur les poèmes du corpus et d’autres poèmes
que vous avez lus ou étudiés.