DENIS DIDEROT
Essai sur la vie de Sénèque le philosophe, sur ses
écrits et sur les règnes de Claude et de Néron (1778).
[extraits] |
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[sur La Vie heureuse.]
Sénèque adresse ce petit traité, qu'on peut regarder
comme son apologie et la satire des faux épicuriens, à Gallion, son frère : « Ô
Gallion, mon frère, tous les hommes veulent être heureux; mais tous sont
aveugles, lorsqu'il s'agit d'examiner en quoi consiste le bonheur.» Notre
philosophe avait rencontré la vraie base de la morale : à parler
rigoureusement, il n' y a qu'un devoir, c'est d'être heureux ; il n' y a
qu'une vertu, c'est la justice.
Avant que d'entrer dans quelques détails sur cet écrit, qu'on peut
analyser en peu de mots, il faut que je jette un coup d' œil sur la morale des
anciens, et sur les progrès successifs de cette science importante. Tout ce
qu'elle a de plus élevé, de plus profond, les anciens l'avaient dit, mais
sans liaison : ce n'était point le résultat de la méditation qui pose des
principes, et qui en tire des conséquences; c'étaient les élans isolés et
brusques d'âmes fortes et grandes. Qui est-ce qui inspirait au Caraïbe de se
précipiter au milieu des flots en courroux, pour ravir à la mort des européens
naufragés sur ses côtes et prêts à périr ? Lorsque ces malheureux sont
prosternés tremblants aux genoux de leurs ennemis, qui est-ce qui fit dire au
cacique : « Relevez-vous, ne craignez rien, etc.» ? Le fait que je vais
raconter, je le tiens d'un missionnaire de Cayenne, témoin oculaire. Plusieurs
nègres marrons avaient été pris, et il n'y avait point de bourreau pour les
exécuter. On promit la vie à celui d'entre eux qui consentirait à pendre ses
camarades, c'est-à-dire au plus méchant. Aucun n'acceptant la proposition, un
colon commande à un de ses nègres de les pendre, sous peine d'être pendu
lui-même. Ce nègre demande à passer un moment dans sa cabane, comme pour se
préparer à obéir à l'ordre qu'il a reçu : là, il saisit une hache, s'abat le
poignet, reparaît; et présentant à son maître un bras mutilé, dont le sang
ruisselait : « A présent, lui dit-il, fais-moi pendre mes camarades ! » Qui
est-ce qui a placé ce sentiment héroïque dans l'âme d'un esclave ? Est-ce l'étude, est-ce la réflexion ? Est-ce la connaissance approfondie des devoirs ?
Nullement.
Dans les premiers temps, les hommes qui se sont distingués par les
actions les plus surprenantes, étaient asservis aux plus grossiers préjugés.
Le rêve d' une vieille femme avait peut-être mis les armes à la main au brave
cacique qu'on vient d'entendre parler si fièrement à ses ennemis. Un autre
cacique leur eût peut-être impitoyablement cassé la tête. Il n' y a pas de
science plus évidente et plus simple que la morale pour l'ignorant : il n'y
en a pas de plus épineuse et de plus obscure pour le savant. C'est peut-être
la seule où l'on ait tiré les corollaires les plus vrais, les plus éloignés et
les plus hardis, avant que d'avoir posé des principes. Pourquoi cela ? C'est
qu'il y a des héros, longtemps avant qu'il y ait des raisonneurs. C'est le
loisir qui fait les uns; c'est la circonstance qui fait les autres : le
raisonneur se forme dans les écoles, qui s'ouvrent tard; le héros naît dans
les périls, qui sont de tous temps. La morale est en action dans ceux-ci,
comme elle est en maximes dans les poètes : la maxime est sortie de la tête du
poète, comme Minerve de la tête de Jupiter... Souvent il faudrait un long
discours au philosophe pour démontrer ce que l'homme du peuple sent
subitement.
Qu'est-ce que le bonheur ? Ce n'est pas une question à résoudre
au jugement de la multitude. Qu'est-ce que la multitude ? Un troupeau d'esclaves. Pour être heureux, il faut être libre : le bonheur n'est pas fait
pour celui qui a d'autres maîtres que son devoir. - Mais le devoir n'est-il pas
impérieux ? Et s'il faut que je serve, qu'importe sous quel maître ! - Il
importe beaucoup : le devoir est un maître dont on ne saurait s'affranchir
sans tomber dans le malheur; c'est avec la chaîne du devoir, qu'on brise
toutes les autres.
Le stoïcisme n'est autre chose qu'un traité de la liberté prise
dans toute son étendue. Si cette doctrine, qui a tant de points communs avec
les cultes religieux, s'était propagée comme les autres superstitions, il y a
longtemps qu'il n'y aurait plus ni esclaves ni tyrans sur la terre. Mais qu'est-ce que le bonheur, au jugement du philosophe ? C’est la conformité
habituelle des pensées et des actions aux lois de la nature. Et qu'est-ce que
la nature ? Qu'est-ce que ses lois ? Il n'aurait pas été mal de s'expliquer
sur ces deux points; car il est évident que la nature nous porte avec
violence, et nous éloigne avec horreur d'objets que le stoïcien exclut de la
notion du bonheur. Mais Sénèque écrivait à Gallion, homme instruit, que les
définitions que l'on exige ici auraient ramené aux premiers éléments de la
philosophie. L'homme heureux du stoïcien est celui qui ne connaît d'autre
bien que la vertu, d'autre mal que le vice; qui n'est abattu ni enorgueilli
par les événements; qui dédaigne tout ce qu'il n'est ni le maître de se
procurer, ni le maître de garder, et pour qui le mépris des voluptés est la
volupté même.
Voilà peut-être l'homme parfait : mais l'homme parfait est-il
l'homme de la nature ? Il me semble que, dans la nature, le corps est le tyran
de l'âme, par les passions effrénées et les besoins sans cesse renaissants;
et qu'au contraire, dans l'état de société, il n'en est ni l'esclave ni le
tyran : ce sont deux associés qui se commandent et s'obéissent
alternativement : quand j'ai mangé, je médite, et quand j'ai médité, il faut
que je mange. La philosophie stoïcienne est une espèce de théologie pleine de
subtilités; et je ne connais pas de doctrines plus éloignée de la nature, que
celle de Zénon. La recherche du vrai bonheur conduit Sénèque à l'examen de la
volupté d'Épicure; et voici comment il s'en explique : « Pour moi, dit-il, je
pense, […] la volupté naît à côté de la vertu, comme le pavot au pied de
l'épi; mais ce n'est point pour la fleur narcotique qu'on a labouré. » Il
paraît que le mot volupté, mal entendu, rendit Épicure odieux; ainsi que le
mot intérêt, aussi mal entendu, excita le murmure des hypocrites et des
ignorants contre un philosophe moderne. Des efféminés, de lâches corrompus,
pour échapper à l'ignominie qu' ils méritaient par la dépravation de leurs
mœurs, se dirent sectateurs de la volupté, et le furent en effet; mais c'était
de la leur, et non de celle d'Épicure. Pareillement des gens, qui n'avaient
jamais attaché au mot intérêt, d'autre idée que celle de l'or et de l'argent,
se révoltèrent contre une doctrine qui donnait l'intérêt pour le mobile de
toutes nos actions; tant il est dangereux en philosophie de s'écarter du sens
usuel et populaire des mots.
De l'apologie de l'épicurisme, Sénèque passe à l'apologie de la
philosophie en général. Combien j'ai été satisfait, en lisant les chapitres 17
et 18, d'y trouver les mêmes impertinences adressées à Sénèque, et par les
mêmes personnages, que de nos jours. On lui disait, comme à nos sages : « Vous
parlez d' une façon, etc.1 » Voici comment on attaquait autrefois le stoïcien
Sénèque, et la manière dont il se défendait. « Si donc un de ces détracteurs
de la philosophie vient me dire, etc.2 » Tout ce qui précède, tout ce que
j'omets, tout ce qui suit, est très beau. Quand on cite Sénèque, on ne sait ni
où commencer, ni où s'arrêter. Les philosophes modernes pourraient dire à
leurs détracteurs, ce que le sage de Sénèque disait aux siens : « Ne vous
permettez pas de juger ceux qui valent mieux que vous, etc.3 » (XCI- XCII)
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1.« Tu parles, dit-on, d'une manière, et tu vis d'une autre. » (La
Vie heureuse, chapitre XVIII).
2. « Si donc quelqu'un de ces gens qui aboient contre la philosophie s'en
vient dire, selon leur coutume : « Pourquoi parles-tu plus courageusement que
tu ne vis ? etc. » (La Vie heureuse, chapitre XVII).
3. « Non, les choses humaines, bien que vous connaissiez peu votre situation,
n'en sont pas à ce point, qu'il vous reste tant de loisir, et que pour blâmer
les torts de gens meilleurs que vous, vous ayez le temps d'agiter votre
langue. » (La Vie heureuse, chapitre XXVII).
[sur La Brièveté de la
vie.]
On présume que le Paulinus, à qui Sénèque adresse ce traité, était père de
Pauline, la seconde femme de Sénèque. Il exerçait à Rome une charge très
importante, la surintendance générale des
vivres.
« La vie n'est courte, dit Sénèque, que par le mauvais emploi
qu'on en fait. »
« Perdre sa vie, c'est tromper le décret des dieux. »
« Se cacher son âge, c'est vouloir mentir au destin. ».
Ce traité, qu'on ne lit
point sans s'appliquer à soi-même la plupart des sages réflexions dont il est
semé, est surtout célèbre par la réponse vive, ingénieuse et même éloquente,
d'un homme de lettres, à laquelle il donna lieu. Un de ses amis, témoin de
ses regrets sur la rapidité du temps, sachant d'ailleurs combien il en était
prodigue, l'interrompit en lui citant ce passage de Sénèque : Tu te plains
de la brièveté de la vie et te laisses voler la tienne.
« On ne me vole point ma vie, répondit le philosophe, je la donne :
et qu'ai-je de mieux à faire que d'en accorder une portion à celui qui
m'estime assez pour solliciter ce présent ? Quelle comparaison d'une belle
ligne, quand je saurais l'écrire, à une belle action ? On n'écrit la belle
ligne que pour exhorter à la bonne action, qui ne se fait pas : on n'écrit la
belle ligne que pour accroître sa réputation; et l'on ne pense pas qu'au bout
d'un nombre d'années assez courtes, et qui s'écoulent avec rapidité, il sera
très indifférent qu'il y ait au frontispice de la Pétréide, Thomas, ou un
autre nom; on ne pense pas que le point important n'est pas que la chose soit
faite par un autre ou par soi, mais qu'elle soit faite et bien faite; on
prise plus l'éloge des autres que celui de sa conscience. On ne me louera,
j'en conviens, ni dans ce moment où je suis, ni quand je ne serai plus; mais
je m'en estimerai moi-même; mais on m'en aimera davantage. Ce n'est point un
mauvais échange que celui de la bienfaisance, dont la récompense est sûre,
contre de la célébrité, qu'on n'obtient pas toujours, et qu'on n'obtient
jamais sans inconvénient. Je n'ai jamais regretté le temps que j'ai donné aux
autres, je n'en dirais pas autant de celui que j'ai employé pour moi.
Peut-être m'en imposé-je par des illusions spécieuses, et ne suis-je prodigue
de mon temps, que par le peu de cas que j'en fais : je ne dissipe que la chose
que je méprise : on me la demande comme rien, et je l'accorde de même. Il faut
bien que cela soit ainsi, puisque je blâmerais en d'autres ce que j'approuve
en moi. »
« Fort bien, répliquera Sénèque, mais le temps que tu t'es laissé ravir
par une maîtresse, celui que tu as perdu à te quereller avec ta femme, tes
domestiques et tes enfants ? En amusements ? En distractions ? En débauches de
table ? En visites inutiles ? En courses aussi fatigantes que superflues ? Tes
passions, tes goûts, tes fantaisies, tes folies, n'ont-ils pas mis tes jours
et tes nuits au pillage. sans que tu t'en sois aperçu ? »
Sénèque a raison : les journées sont longues et
les années sont courtes pour l'homme oisif : il se traîne péniblement du
moment de son lever, jusqu'au moment de son coucher; l'ennui prolonge sans
fin cet intervalle de douze à quinze heures, dont il compte toutes les minutes
: de jours d'ennui en jours d'ennui, est-il arrivé à la fin de l'année, il
lui semble que le premier de janvier touche immédiatement au dernier de
décembre, parce qu'il ne s'intercale dans cette durée aucune action qui la
divise. Travaillons donc : le travail, entre autres avantages, a celui de
raccourcir les heures et d'étendre la vie.
Si le ciel nous exauçait, l'impatience de nos craintes, de nos espérances, de nos
souhaits, de nos peines, de nos plaisirs, abrégerait notre vie des deux tiers. Être bizarre, tu crains la fin de ta vie; et en une infinité de
circonstances, tu hâtes la célérité du temps ! Il ne tient pas à toi qu'entre
l'instant où tu es, et l'instant où tu voudrais être, les jours, les mois,
les années intermédiaires ne soient anéanties : la chose que tu attends, n'est rien peut-être, ou presque rien, et celle que tu sacrifierais volontiers,
est tout !
Sénèque prétend qu'Aristote intenta à la nature un procès indigne
d'un sage, sur la longue vie qu'elle accorde à quelques animaux, tandis qu'elle a marqué un terme si court à l'homme, né pour tant de choses
importantes. « Nous n'avons pas trop peu de temps, lui dit-il; nous
en perdons trop... » Certes, ce n'était pas un reproche à faire au plus
laborieux des philosophes... « La vie serait assez longue, et suffirait pour
achever les plus grandes entreprises, si nous savions en bien placer les
instants... » Cela est-il vrai ? La course de notre vie est déjà fort avancée
lorsque nous sommes capables de quelque chose de grand; et celui qui avait
formé le projet de te faire admirer des Français, en leur mettant ton ouvrage
sous les yeux, est mort avant que d'avoir mis la dernière main à son travail ? Sénèque, adressez ces reproches aux hommes dissipés; mais épargnez-les
à Aristote, épargnez-les à vous-même, et à tant d'hommes célèbres, que la
mort a surpris au milieu des plus belles entreprises. Je suis bien loin de
sentir comme vous : je regrette que vos semblables soient mortels.
Je n'aurais pas de peine à trouver dans Sénèque plus d'un endroit où il se plaint
de la multiplicité des affaires, et de la rapidité des heures. L'animal sait,
en naissant, tout ce qu'il lui importe de savoir : l'homme meurt lorsque son
éducation est faite.
Je ne suis pas plus satisfait de ce qu'il vient de dire
à Aristote, que de ce qu'il va dire à Paulinus : « Songez à combien
d'inquiétudes vous expose un emploi aussi considérable : vous
avez affaire à des estomacs qui n'entendent ni la raison ni l'équité : vous
êtes le médecin d'un de ces maux urgents, qu'il faut traiter et guérir à
l'insu des malades. Croyez-vous qu'il y ait aucune comparaison entre passer
son temps à surveiller aux fraudes des marchands de blé, à la négligence des
magasiniers, à prévenir l'humidité qui échauffe et gâte les grains, à empêcher
que la mesure et le poids n'en soient altérés; et vous occuper de
connaissances importantes et sublimes sur la nature des dieux, le sort qui les
attend, leur félicité ?» Je répondrais à Sénèque : non, je ne compare pas ces
fonctions; c'est la première qui me paraît la plus urgente et la plus
utile... « On ne manquera pas, dites-vous, d'hommes d'une exacte probité, d'une stricte attention...»
Vous vous trompez : on trouvera cent
contemplateurs oisifs, pour un homme actif; cent rêveurs sur les choses d'une autre vie, pour un bon administrateur des choses de celle-ci. Votre
doctrine tend à enorgueillir des paresseux et des fous, et à dégoûter les bons
princes, les bons magistrats, les citoyens vraiment essentiels. Si Paulinus
fait mal son devoir,
Rome sera dans le tumulte. Si Paulinus fait mal son devoir, Sénèque manquera
de pain. Le philosophe est un homme
estimable partout; mais plus au Sénat, que dans l'école; plus dans un
tribunal, que dans une bibliothèque; et la sorte d'occupations que vous
dédaignez, est vraiment celle que j'honore; elle demande de la fatigue, de
l'exactitude, de la probité : et les hommes doués de ces qualités, vous
semblent communs ! Lorsque j'en verrai qui se seront fait un nom dans la
magistrature, au barreau, loin de croire qu'ils ont perdu leurs années pour
qu'une seule portât leur nom, je serai désolé de n'en pouvoir compter une
aussi belle dans toute ma vie. Combien il faut en avoir consumé dans l'étude,
et dérobé aux plaisirs, aux passions, au sommeil, pour obtenir celle-là. Sage
est celui qui médite sans cesse sur l'épitaphe que le doigt de la justice
gravera sur son tombeau. Turannius1 a abdiqué les places où il servait
utilement sa patrie, et s'est condamné au repos, quand il avait encore des
forces d'esprit et de corps; et lorsque Turannius se fait mettre au lit, et
pleurer par ses gens, comme s'il eut été mort, Turannius vous paraît ridicule
? Dans un autre moment, vous eussiez dit que Turannius avait fait de lui-même,
et de ceux qui quittent la république trop tôt, une satire forte, une critique
sublime.
« Si quelques-uns de vos concitoyens ont été souvent
revêtus des charges de la magistrature, ne leur portez point envie. » -
J'y consens, il ne faut porter envie à personne. - « S'ils se sont rendus
célèbres au barreau, ne leur portez point envie. » - Et pourquoi ! - «
C'est qu'ils ont acquis cette célébrité aux dépens de leur vie. » - Et
quelle est la célébrité qu'on acquiert autrement ? - « C'est qu'ils ont
perdu leurs années. » - Quoi, les années consacrées au bien général sont
des années perdues ? - « Les hommes obtiennent plus facilement de la loi,
que d'eux-mêmes, la fin de leurs travaux. » - Je les en loue. - «
Personne ne pense à la mort. » - Il est bien de penser à la mort, mais
afin de se hâter de rendre sa vie utile.
C'est un défaut si
général, que de se laisser emporter au-delà des limites de la vérité, par l'intérêt de la cause qu'on défend, qu'il faut le pardonner quelquefois à Sénèque. Je n' ai pas lu le chapitre 3 sans rougir : c'est mon histoire.
Heureux celui qui n'en sortira point convaincu qu'il n'a vécu qu'une très
petite partie de sa vie ! Ce traité est très beau : j'en recommande la
lecture à tous les hommes; mais surtout à ceux qui tendent à la perfection
dans les beaux arts. Ils y apprendront combien ils ont peu travaillé, et que
c'est aussi souvent à la perte du temps, qu'au manque de talent, qu'il faut
attribuer la médiocrité des productions en tout genre. (XCVI-XCVII)
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1. Turannius, vieillard d’une activité et d’une exactitude rares, était
chargé de l’approvisionnement de Rome. Ayant à l’âge de quatre-vingt-dix ans,
reçu de Caïus César, sans l’avoir offerte, la démission de sa charge, il se
mit au lit, et ordonna à ses esclaves rassemblés autour de lui, de le pleurer
comme mort. Toute la maison s’affligeait du loisir de son maître ; et les
lamentations ne cessèrent que lorsqu’il fut rendu à ses fonctions. Est-il donc
si doux de mourir occupé ?» (La Brièveté de la vie, chapitre XX).