Les manuscrits autographes
primitifs de l'Éducation sentimentale acquis
par la Bibliothèque Nationale en 1975 se composent de
quelque 2.350 feuilles volantes de grand papier vergé
blanc réparties dans six volumineux dossiers de
maroquin rouge. (Actuellement reliés en 13 vol.
demi-chagrin violet.)
Dans cette énorme masse régnait le plus complet
désordre, à tel point que les Flaubertistes
renoncèrent à entreprendre toutes études et travaux
sur ces papiers jusqu'à ce qu'un classement en rende
la consultation possible.
Quelle méthode fallait-il adopter pour ce
travail de base, ingrat mais indispensable ?
Un premier examen met en présence de brouillons
aux multiples aspects : ébauches, projets, scénarios,
rédactions successives plus ou moins élaborées allant
du grimoire parfois illisible à la mise au net presque
sans retouches.
Chaque feuillet est utilisé recto et verso,
pour des brouillons ou des recopies le plus souvent
sans rapport entre eux, de sorte qu'à un ordre des
rectos correspondra un désordre des versos.
Outre les variantes manuscrites très nombreuses
par rapport au texte de l'édition, on remarque la
suppression ou le déplacement de plusieurs passages.
Certains ont été découpés aux ciseaux, ou déchirés à
la main afin d'être déplacés et joints à une autre
partie des brouillons.
Les feuillets étant presque tous chargés
d'écriture sur leurs deux faces, laquelle fallait-il
considérer comme recto et laquelle comme verso ? On a
choisi d'adopter comme recto la face barrée d'une
grande croix en X.
Une tentative pour détacher de l'ensemble une
version continue du texte a dû être abandonnée : trop
de lacunes dans les pages au propre devaient être
comblées par des brouillons informes qui en rompaient
la succession logique.
En vue de faciliter l'étude du manuscrit, il
fallait donc s'arrêter à une solution avant tout
pratique, à savoir : rapprocher chaque recto
représentant un même passage du texte.
Du désordre primitif, une feuille après l’autre
a été extraite, examinée, comparée avec l'édition
(Garnier-Flammarion 1969, choisie comme étant
actuellement la plus accessible – Mais noter que le
texte du roman ne commence qu'à la p. 37, après la
préface). Puis, recto et verso étant situés par
rapport au texte imprimé, on a porté au crayon sur
l'une et l'autre face le chiffre de la page
correspondante.
Si le texte de la page manuscrite recouvre,
dans l'ensemble, celui d'une page imprimée, on a noté
sur le manuscrit le chiffre seul ; si le texte de la
page manuscrite déborde celui de la page imprimée, on
a fait suivre le chiffre de plusieurs points...
Ces chiffres-repères ont été également portés
sur les photocopies qui ont été mises dos à dos à
l'aide d'un trombone afin de reconstituer le feuillet
original. En vue d'une édition éventuelle, il y aurait
donc lieu de les dissocier et de les reclasser d'après
les chiffres au crayon qu'elles comportent.
Ce travail de repérage achevé, tous les rectos
ont été regroupés en ordre numérique successif d'après
la pagination de l'édition.
La mise en ordre des rectos conditionne
forcément le désordre des versos qui, soulignons-le
encore, ne pourront être reclassés que par les
photocopies. (À signaler que plusieurs photocopies
sont en double tandis que d'autres manquent).
Sur la plupart des pages figurent des
numérotations diverses de la main de Flaubert :
chiffres romains, chiffres arabes, lettres. Elles ne
présentent pas une série continue, mais des groupes de
pages sans doute en vue de la recopie au net (Ms. de
la Bibliothèque de la Ville de Paris).
Au fur et à mesure du dépouillement ont été
retirés tous les feuillets (de dimensions diverses)
qui n'appartiennent pas une rédaction narrative, à
savoir plans, scénarios, notes documentaires et
autres, afin de constituer un volume à part. Ceci à
l'exception de quelques scénarios écrits sur la même
feuille qu'une portion de texte et qui, de ce fait,
ont été maintenus dans celui-ci.
Un petit dossier de documents divers (fragments
manuscrits, notes documentaires, lettres) ayant fait
l'objet d'un achat postérieur, a été placé à la fin du
dernier volume.
Une édition du « vieux manuscrit » de l'Éducation
sentimentale représenterait un travail
considérable. Peut-être pourrait-on envisager d'abord
et plus modestement la publication des plans et
scénarios ? Ou encore l'étude de tel chapitre
considéré tout au long de son élaboration ?
Madeleine Cottin
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b6000150x/f1.image
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