POUR UN EXPOSÉ SUR LE SURRÉALISME

      

  Le Surréalisme est un mouvement littéraire et culturel dont l’abord, difficile, pose problème au professeur : ce dernier peut garder en mémoire les préventions de Breton à l’égard de « l’explication de texte », notamment en milieu scolaire, susceptible d’assujettir à l’étroite raison le jaillissement de l’imaginaire. Il peut surtout craindre de ne pas pouvoir trouver dans les productions surréalistes de quoi observer la rigueur nécessaire aux méthodes de l’examen.
   Sur bien des plans, cette crainte, pourtant légitime, se trouve infondée : le texte, l’image surréaliste mettent en jeu des principes, obéissent à une intention, même inconsciente (Breton n’a-t-il pas lui-même « expliqué » La Nuit du Tournesol ?). Simplement, les méthodes scolaires d’analyse doivent pouvoir s’adapter aux moyens exploités par les artistes surréalistes et se placer à l’unisson d’un mouvement qui, dans un contexte souvent tragique, a souhaité réformer l’entendement humain tout entier.
   Pour ces raisons, un exposé destiné à présenter le Surréalisme devrait d’abord être capable de le situer, avant de détailler les trois grands pôles de son esthétique et de sa morale, que Breton a résumés dans la célèbre formule : « la poésie, l’amour, la liberté. »

I) Questions de contexte :

- Intertexte : Breton a eu beau affirmer : « En matière de révolte, nul n’a besoin d’ancêtres », le Surréalisme s’inscrit bel et bien dans une continuité. L’exposé pourra commencer par rappeler l’évolution de la poésie depuis Baudelaire, sur le plan thématique (la condition de l’artiste, le goût de la révolte, la modernité) comme sur le plan formel (libération à l’égard des moules poétiques) : l’apport de Rimbaud, du Symbolisme (Mallarmé), de l’esprit nouveau (Apollinaire) seront rapidement évoqués.
- Contexte : en première, l’étude du surréalisme va coïncider avec le programme d’histoire. C’est l’occasion d’inscrire précisément le Surréalisme entre les deux guerres mondiales et de montrer comment il a manifesté audace et modernité dans les positions qu’il a prises (notamment sous l’impulsion de Breton) dans les grands combats du siècle : guerres de colonisation, procès de Moscou, poussées des fascismes  (lecture d’extraits du Second Manifeste du surréalisme de Breton).

II) Une révolution du langage :

- L’exposé pourra évoquer les travaux de Freud et la récupération par les surréalistes de la méthode psychanalytique à des fins esthétiques » (lecture d’extraits d’Une Vague de rêves d’Aragon).
- Il devra préciser la finalité et les procédures de l’écriture automatique, imaginée par les premiers surréalistes comme un  moyen de libérer « la pensée sauvage » (lecture d’extraits des Champs magnétiques de Breton et Soupault).
- Il pourra enfin expliquer la théorie de l’image, dont les grands peintres surréalistes se feront l’écho (Dali, Ernst, Magritte) : un accompagnement visuel indispensable permettra aux élèves de constater ce rapprochement fulgurant souhaité par Breton entre deux réalités éloignées, et la manière dont finit par s’imposer le modèle intérieur.

III) Une révolution morale :

- « Transformer le monde et changer la vie » : ces deux mots d’ordre expliquent la formidable énergie du Surréalisme.  L’exposé pourra le situer dans les grands humanismes européens, soucieux de libérer l’homme par l’art.
- Les grands thèmes surréalistes annoncent les débats actuels et sur certains plans les ont suscités. Un public de lycée devrait être saisi par cette modernité et par ce souci constant de porter haut les couleurs de l’Amour, de libérer la femme, de permettre aux peuples de se prendre en charge. Pour hâter tous ces combats, le Surréalisme a cru dans « le génie de la jeunesse » » (lecture d’extraits d’Arcane 17 de Breton)
- L’exposé pourra enfin montrer comment la morale surréaliste attire l’attention sur toutes les catégories négligées par la rationalité de l’homme occidental. A cette Raison impérialiste, les artistes surréalistes ont opposé la folie, la magie, le merveilleux, l’enfance. Chaque mouvement de nature insurrectionnelle retrouve aujourd’hui quelque chose de ce procès intenté à notre civilisation.